Grottes et karsts de Chine
Sur les traces de Xu Xiake

L'entrée de cette galerie à nitrate de 8x3 m, véritable collecteur fossile, a été découverte grâce au gros panache de vapeur qu'elle exhale par temps froid. Remarquablement rectiligne, elle s'avance au-dessus des schistes jusqu'à un gros puits.

Accès : Depuis Shuanghe en direction de Wenquan, un peu après le petit temple sous la falaise en bord de route, une petite route bétonnée sur la droite pénètre une vallée latérale par sa rive gauche. Au fond de la val, la montée est très raide. Prendre à droite dans le premier village. Suivre la route principale sur plus de 1 km, puis prendre à droite aux deux bifurcations que l'on rencontre. Après une montée en lacets suivre une longue combe jusqu'à un col où se trouve le hameau de 烂泥垭 Laniya. Au col, prendre à gauche. La route longe une gorge profonde. Environ 2 km plus loin, prendre une piste sur la gauche jusqu’à son terminus, 200 m après une cabane, là où s’ouvre Huojipingdong. Il faut ensuite monter dans le ravin, franchir la crête et redescendre en travers de la pente pour respecter une quasi ligne droite. La grotte s'ouvre au pied de la dernière barre rocheuse précédant une couche de schistes où la forêt laisse place à des buissons dont le franchissement constitue une épreuve particulièrement détestable.

Description : Le porche d'entrée annonce le début d'un grand réseau. Les deux grosses concrétions, une stalagmite et une colonne, ont été complétés de quelques blocs disposés en un muret rudimentaire. Les traces d'érosion sur les parois pourraient être tout aussi bien d'origine éolienne, mais on trouve quelques marmites au sol qui ne sauraient mentir. Les blocs effondrés sont là depuis si longtemps qu'ils sont criblés d'impacts de gouttes d'eau formant des godets de plusieurs centimètres. On aperçois vite deux grands bassins ronds qui annoncent une grotte à nitrate. Sans surprise, le puits suivant est bordé d'un chemin pavé de pierres plates. Au fond de ce puits concrétionné, une galerie revient sous les bassins à nitrates. Un peu avant ce puits, la galerie latérale est très courte et également colmatée par les concrétions. La galerie avance tout droit, de sorte que le ciel reste visible à plus de 100 m de l'entrée. C'est une légère descente suivie d'une montée qui prive la suite de lumière. Un petit affluent arrive en rive gauche et se perd dans le premier puits, d'une dizaine de mètres, sous un amoncellement de blocs.

Un tronc y a été apporté, sans doute pour y attacher une échelle de cordes. Les derniers escaliers taillés dans l'argile précédant ce puits, on peut penser que l'exploitation de nitrates concernait des galeries accessibles par ce puits. A moins qu'une seule descente d'exploration n'ait été effectuée, mais on ne comprendrait alors pas ce qui a justifié les travaux importants constatés dans l'entrée.

La galerie se poursuit. Elle est barrée d'un gros puits. Son contournement, par un sentier sommaire, a demandé un long travail au marteau. Le gros puits suivant est moins impressionnant. Plus loin, un petit P8 a pu être descendu avec une simple cordelette et un méandre inférieur exploré jusqu'à un proche palier dans le puits précédant. Le gros puits suivant présente un gros bloc coincé formant un pont qui offre une option de franchissement intéressante. Un petit affluent en a taillé une paroi bien verticale, permettant par jet de pierre une estimation de 60 m, valeur qui est provisoirement retenue pour les autres gros puits de cette galerie. Plus loin, à plus de 300 m de l'entrée, on atteint le bout de la galerie. Un ultime puits, dont le creusement bien rond a été favorisé par un petit affluent, lui fournit un bien beau terminus.

Remarques : Les affluents, disposés sur les deux rives de la galerie, sont de débits très faibles et proviennent de passages très étroits. La galerie suit une fracture qui sous terre ne se manifeste que par une mince fissure dans le plafond très plat. Il est cocasse de constater que l'itinéraire d'accès idéal se superpose exactement avec la topographie souterraine. Ce détail ne doit rien au hasard. Dans cet alignement se trouvent aussi, mais à 1,3 km environ, la signature d'une fracture importante dans le parcours de Chuandongwanxianshengdong. Dans ce secteur, une descente de 50 à 60 m semble régulièrement marquer le passage d'une première couche de schistes de l'ordovicien moyen. On notera aussi que l'ultime point atteint par la galerie correspond à la verticale de la fin de la couverture actuelle d'ordovicien supérieur selon l'axe de la fracture.

Compte tenu du courant d'air, qui provient indiscutablement des puits, la probabilité d'une jonction avec Shuanghedong est quasiment certaine. [Jean Bottazzi]