dong Fujiadadong - 付家大洞

2. Fujiadadong - Grande grotte de la famille Fu
(fig. 81) - Code : Liu971 - Village : Xingchang
Dév. : 4 769 m - Dén. : - 138, + 34 m - Vol. : ± 1 711 710 m3
Lat. : 26°25’14” N - Long. : 105°18’30” E - Alt. : 1 490 m
La grotte de Fujia est située à 1 km au nord-est du village de Xingchang. Cette cavité de grandes dimensions a été topographiée sur 440 m seulement le 8/7/97 par le stage de formation technique ; aussi, en 1998, s’impose-t-elle comme notre premier objectif. Du 17 au 23/8/1998, au cours de six explorations totalisant 43 h d’exploration, la topographie passe à 4 769 m.
Le réseau de Fujiadadong possède actuellement cinq entrées ; les deux principales sont des dolines-puits de belle taille : Fujiadadong et Yuandong. Il constitue le deuxième maillon du système supposé de la Heitanghe souterraine. Tout comme Liangjiadong, il s’étire du sud-ouest au nord-est. Les traces d’occupation humaine sont omniprésentes : fortifications, nombreux aménagements pour l’habitat, exploitation de nitrate parfois loin dans le réseau, exploitation du bois dans la doline de Yuandong.
- Le réseau de Fujiadadong
L’accès le plus simple se fait par la doline d’effondrement de Fujiadadong, de 80 m de long sur 40 m de large, qui recoupe un large conduit. Cet aven de 35 m de profondeur présente une végétation luxuriante qui cache de petits porches aménagés tandis que sur la paroi ouest s’ouvre un trou non exploré exhalant un souffle d’air froid. La descente se fait par le bord sud et nécessite l’équipement d’un ressaut de 9 m. Au fond, la galerie Sud, de 15 m de diamètre, remonte sur 120 m de développement vers le sud-ouest jusqu’à de grandes coulées stalagmitiques. Derrière, une escalade délicate dans une trémie instable mène à la cote + 34 m qui constitue le point haut de tout le réseau. Au plafond, deux orifices difficilement accessibles laissent passer un rayon de soleil bien aguichant pour l’explorateur. En redescendant, à main gauche, soit à 55 m de distance de l’aven de Fujiadadong, débute l’étroit méandre de l’Opium.
Après 20 m de reptation s’ouvre un puits de 7 m. Au carrefour suivant, le boyau de droite mène à une niche concrétionnée dans laquelle nous avons eu la surprise de découvrir les restes d’un malheureux qui n’a sans doute pas choisi de mourir ici. D’après la pipe à Opium trouvée à côté, le corps remonte à 150 ans environ, c’est-à-dire durant la guerre de l’opium ou la révolution des Taiping. En face, la galerie remonte dans des concrétions et à gauche mène à un petit puits de 7 m impénétrable.
De la base du puits d’entrée de Fujiadadong, la galerie du Rempart débute au nord-est par un porche trapézoïdal de 20 m de large sur 30 m de haut barré par un mur de fortification. Le plafond en encorbellement présente une surface lisse à peine troublée par une belle onde régulière, sans doute une ride de courant. La galerie plonge rapidement jusqu’à la salle Carrefour, à - 70 m, autour de laquelle s’articulent tous les réseaux.
A partir de cette salle, au nord, près d’un four à nitrate, commence une grande galerie remontante de 15 m de diamètre dénommée le Double Eboulis. On gagne ainsi, en deux raides éboulis, 100 m de dénivellation en 275 m de développement, pour aboutir au niveau d’une strate décollée du plafond. A mi-parcours, sur la gauche, une galerie mène à une escalade très ventilée, mais non explorée.
En contre bas de la salle Carrefour, au sud, démarrent deux réseaux situés derrière un massif de concrétions démantelées. A gauche, le réseau du Lac étire ses gours sur 85 m jusqu’à un lac siphonnant de 24 m de long. A gauche du lac, une étroiture désobstruée donne sur un puits estimé à 40 m non descendu. Depuis la salle Carrefour, à l’ouest, se développe la galerie du Bouclage. Au bout de 70 m, une bifurcation invite à se diriger d’abord tout droit jusqu’au sommet d’un puits de 33 m, le Pet 33, qui livre l’accès à un méandre torturé et sale se terminant sur une étroiture à la cote - 120 m. Revenu à la bifurcation, on peut aussi s’engager sous le bloc à gauche pour rallier le réseau du P6 qui développe 300 m jusqu’à - 135 m. Au bout de 200 m de progression, de ressauts en méandres vastes et inclinés, on parvient à une petite perte à partir de laquelle s’étirent deux nouvelles galeries. Au sud, un affluent se laisse remonter sur 45 m jusqu’à une trémie avec un fort courant d’air. A l’ouest, une galerie riche en remplissages, en forme de montagnes russes, s’étire sur 75 m jusqu’au pied d’une grande coulée stalagmitique non escaladée.
A la salle Carrefour, au nord-est, la galerie de la Trémie descend jusqu’à la cote - 88 m au croisement avec le Bicollecteur, puis remonte lentement jusqu’à une trémie fort ventilée à la cote - 43 m. Sur la gauche une galerie en boucle se termine sur une étroiture impénétrable. En contrebas de la salle Carrefour, au sud-est, un ensemble compliqué de galeries permet de descendre d’un étage et de rejoindre soit le siphon de - 137 m, soit la galerie du Gypse. Cette dernière, au sol terreux, mesure 250 m de long d’abord vers le nord-est sous la galerie de la Trémie, puis vers le nord sous la galerie du Double Eboulis. Il s’agit d’une ancienne conduite forcée dont le colmatage a réduit la section à 1,5 m de large sur 0,8 m de haut.
La galerie dénommée Bicollecteur est le seul conduit permettant d’accéder au réseau de Yuandong à partir de Fujiadadong. Cette petite galerie très ventilée a la particularité d’avoir deux cours d’eau qui coulent en sens opposé : l’un provient de Fujiadadong, l’autre de Yuandong ; ils confluent pour alimenter le siphon de - 137 m. Elle débouche sur la doline-puits de Yuandong par deux petites entrées : la première (côté jardin) est un soupirail noyé d’embruns brassés par les courants d’air, la seconde (côté cour) est un petit balcon en falaise perché à 7 m au-dessus de l’éboulis.

- Le réseau de Yuandong (grotte circulaire)
La grande doline-puits circulaire de Yuandong mesure au moins 50 m de profondeur. Elle n’a jamais été descendue depuis sa lèvre supérieure. Déboucher à la base de ce gros aven par le petit porche, “côté jardin”, est un spectacle que l’on n’oublie pas (photos 114 et 115). En ce mois de juillet 1998, après une journée de violents orages, ce ne sont pas moins de cinq cascades qui se précipitent dans le puits. Certaines proviennent de ruisseaux coulant sur la couverture argileuse du Trias, d’autres émergent par de petits orifices perchés à mi-hauteur dans la falaise. Dans cet écrin de calcaire blanc, le grand éboulis qui monte vers le sud-ouest est masqué sous le couvert dense de plantes aux fleurs violettes ; la forêt primitive a été complètement exploitée. Le plafond de la caverne, aujourd’hui disparu, est délimité par un cercle d’azur de 100 m de diamètre rejoint par les gerbes arc-en-ciel des cascades.
Derrière le cône d’éboulis, dont le sommet est à l’aplomb du bord ouest de la doline-puits, on observe les contours d’un autre puits de moindre importance. Au sud-ouest s’ouvre le porche de Collapstrate ; comme son nom le suggère, il présente plusieurs paquets de strates effondrées de plus 60 m de long, 20 m de large et 15 m de haut sur le flanc gauche. La galerie, au plafond en encorbellement, se dirige vers le sud-ouest sur 250 m, jusqu’à un colmatage sédimentaire d’où sourd une petite arrivée d’eau qui se perd dans un soutirage impénétrable à la cote - 116 m.
A l’aval de la doline, donc au nord-est, la gueule carrée d’un gros porche invite l’explorateur. La pente d’éboulis continue encore sur 50 m, puis on prend pied sur un sol plat, recouvert d’argile, baptisé La Plage, constituant le point bas de la cavité à la cote - 138 m. Le plafond est percé par un puits arrosé somptueux, aux découpes alpines, dont la hauteur est estimée à 130 m. Sur l’argile, une rivière de 20 l/s canalise l’eau des cascades et se perd sous un chaos de blocs à proximité de la paroi. Juste au nord, à 20 m de distance, deux énormes piliers résiduels tentent de soutenir l’immense voûte qui tend à s’affaisser vers le sud-est. Derrière les piliers, au nord-est, on débouche dans Chinese Avenue, une galerie de 300 m de long, typiquement chinoise, dont la largeur atteint 50 à 60 m dans un océan de blocs.
Le terminus actuel, à - 42 m, constitue pour l’instant l’extrême aval de l’ensemble du réseau. C’est une zone effondrée, située quasiment au plafond de la galerie ; elle n’a pas été fouillée. A l’ouest, un beau conduit de 50 m2 de section, court-circuite Chinese Avenue ; c’est la galerie des Nitrates Oubliés. Comme son nom l’indique, elle fut le site d’une petite exploitation. Elle se développe sur 250 m avant de buter sur une fracture formant trémie dans laquelle on s’insinue pour déboucher dans la galerie du Tuyau. Ce conduit incliné rejoint Chinese Avenue au sud-est ; à l’ouest, il remonte jusqu’à la cote - 22 m au niveau d’une barrière stalagmitique.
Dans l’ensemble du réseau, nous n’avons pas pu trouver d’accès à la rivière souterraine du système de la Heitanghe. Néanmoins, les possibilités de découvertes de nouvelles galeries restent nombreuses. Les trois points bas connus situés à -135 m, - 137 m et - 138 m, du sud-ouest au nord-est, suggèrent peut-être l’existence d’un niveau intercalé de marne et d’argile comme celui qui couvre une grande partie du réseau. Mais il est probable que le collecteur passe plus au sud. La couche imperméable supérieure favorise la concentration superficielle des écoulements et leur absorption dans la doline de Yuandong. Cette couverture, souvent étanche, réduit considérablement les eaux de percolation, d’où une absence notoire de concrétions. Quelques chiffres soulignent que l’on est en présence d’une grotte labyrinthique de grandes dimensions. La section moyenne des galeries est de 360 m2 environ, soit 20 x 18 m. Le cavernement connu est de 3,3 %. [F. Darne, J.-P. Barbary]

"BARBARY, Jean-Pierre; BOTTAZZI, Jean; DARNE, Fabien; MAIRE, Richard; MANGEL, Laurent"
Karstologia Mémoires, n° 9 : Voyages en terre chinoise : Chapitre 2
Analyse :
Le plateau de Xingchang (district de Liuzhi, Guizhou, Chine) est un massif économiquement déshérité mais riche d'histoire et de karst. Lors d'expéditions en 1997, 1998 et 2001 nous y avons exploré 22 km de cavités dans quatre réseaux remarquables. Le système perte-résurgence de la Gaoluhe développe environ 12 km. Au nord-est, la grotte de Wuliudaxiaodong est une ancienne exploitation de nitrates de grande ampleur et constitue l'ancien cours souterrain de la Gaoluhe. Au sud, le système de Heitanghe présente deux maillons fossiles : le paléocollecteur de Linjiadong et son prolongement dans l'énorme grotte de Fujiadadong. Ces grottes présentent toutes d'importants vestiges historiques. (BJ).

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