Conclusion

Jean-Pierre Barbary, Richard Maire, Zhang Shouyue

Tous ces résultats fructueux ne doivent pas cacher la difficulté à organiser de tels projets. Aussi bien du côté chinois que de notre côté, le problème majeur reste la recherche des financements qui pose un réel problème car la Chine reste malheureusement une des destinations spéléologiques les plus chères du monde. Les tarifs pratiqués sont d'autant plus difficiles à comprendre qu'ils ne correspondent pas du tout au niveau de vie chinois. Ceci est fort regrettable car l'aspect financier interdit à de nombreux spéléologues occidentaux (supposés riches ?) l'accès à ce fabuleux karst chinois.

 Certains de nos collègues chinois sont conscients de ces problèmes et essaient de trouver des solutions plus adéquates, mais le problème reste complexe, c'est le moins que l'on puisse dire, quand on connaît un peu l'organisation des rapports commerciaux qui existent dans la société chinoise... Mais ne désespérons pas : un proverbe chinois dit "l'eau goutte à goutte finit toujours par percer la pierre" ; c'est tellement vrai dans les immenses karsts chinois !

Pour organiser et mener à termes nos trois expéditions, il aura fallu beaucoup de temps, d'énergie et de patience que seul pouvait soutenir une passion partagée par les deux parties, celle de la découverte et de l'exploration. Car, en plus de cette spéléologie de rêve, la Chine est aussi la terre idéale pour l'exercice de nombreuses disciplines scientifiques dans laquelle le spéléologue de base se trouve impliqué malgré lui et grâce à lui. Il est en effet difficile de séparer ici exploration, topographie et recherche scientifique, tant la découverte de nouvelles cavités donnent envie d'en savoir plus sur l'âge et l'évolution de ces réseaux colossaux, sur le fonctionnement des grandes pertes, sur l'ampleur du soulèvement de la montagne qui fait que vastes tunnels fossiles sont actuellement perchés bien au-dessus des résurgences ! Ici, les millions d'années se télescopent et le spéléologue, en déambulant entre les cônes karstiques et en arpentant les galeries géantes, devient un voyageur du Temps.

Que dire enfin de l'esthétique des montagnes karstiques à pitons et de l'intime relation qui existe en le paysan et les structures agraires qu'il a façonné depuis des millénaires ! Cet âme qui habite le karst chinois est probablement une de nos plus fortes motivations. Ici la montagne et la grotte sont plus vivantes que partout ailleurs dans le monde tant les paysans l'ont apprivoisées depuis longtemps. D'où notre désir d'aller encore plus loin et plus profond, là où personne n'est jamais allé, comme à Donghe de Hefeng, en compagnie de jeunes chinois heureux de découvrir avec nous un monde encore nouveau et si près de chez eux !