Grottes et karsts de Chine... Sur les traces de Xu Xiake

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Gebihe 89 Sommaire

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Chapitre 4 KARSTS ET CAVITÉS DU COMTÉ DE WUXI (SICHUAN)

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- Jean-Pierre BARBARY, Jean BOTTAZZI, Bernard COLLIGNON,  Richard MAIRE

Résumé - Abstract - Zusammenfassung - : La région montagneuse de Wuxi se situe à l'extrémité E de la province du Sichuan, en rive gauche du Yangtse. Elle fait partie des Daba Shan dont le culmen, le Dashennongjia (3053 m), se situe plus à l'E dans le Hubei. La morphologie karstique, en cônes et chevrons étagés, est sous le contrôle d'un style plissé énergique, orienté E-W, avec écailles et failles inverses. La grande profondeur des vallées et des canyons est liée à la très basse altitude du niveau de base (100 m pour le Yangtse). La gorge de la Daninghe, en aval de Wuxi, présente des parois calcaires de 1000 à 1500 m de haut dans le Permo-Trias. Le climat est de type subtropical de montagne, sous influence de la mousson, avec une tendance à la continentalité : forte amplitude des températures (1 à 5) et des précipitations (1 à 15). P = 1255 mm/an et T = 16,4°C à Wuxi (alt. 210 m).
En raison de l'aspect "alpin", le potentiel hydrokarstique peut dépasser, par exemple, 1600 m dans le synclinal oriental de Wuxi où un regard sur le réseau a été découvert à - 150 m près du village de Tongchengba. Celui-ci pourrait dépasser 2000 m à l'E du Daguan Shan. Ce sont les plus forts potentiels karstiques reconnus en Chine centrale et méridionale. Treize cavités ont été explorées dans un rayon de 30 à 40 km autour de Wuxi, entre 290 et 1080 m d'altitude. Les deux plus importantes sont Sifangdong (- 158 m) dans le synclinal E de Wuxi et Xinlongdong (- 167 m, 1,6 km) à 40 km à l'W de Wuxi. La plupart des émergences sont situées à la base ou sur le flanc des canyons (tufs de cascades).

Mots-clés : karst conique, poljé, gouffre, potentiel hydrokarstique, canyon, structure plissée, synclinal, Silurien, Permien, Trias, Daguan Shan, Wuxi, Sichuan, Daninghe, Yangtse.

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• Introduction
• Présentation physique
• Description des cavités
  • I. Les cavités de la zone de Tongchengba
    • A. Sifangdonghetiankeng
    • B. Tongchengba Xiaoshuidong
    • C. Nanmutiankeng
    • D. Shujing 1
    • E. Shujing 2
  • II. Les cavités au nord de Wuxi
    • A. Fengdong
    • B. Fengdongzi
    • C. Longdong
  • III. Les cavités de la paroi ouest du Daguan Shan
  • IV. Les cavités à l'ouest de Wuxi
    • A. Chunshupingtiankeng
    • B. Xiaoshuidong
    • C. La grotte du tunnel
    • D. Longwangdong
    • E. Xinlongdong
• Conclusion

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INTRODUCTION

Le comté de Wuxi se situe à l'extrémité orientale de la province du Sichuan, 40 km au nord des gorges du Yangtse entre Fengjie et Wushan (fig. 42). Cette région montagneuse fait partie des Daba Shan qui culminent à 3053 m au Dashennongjia, le plus haut sommet de Chine centrale, localisé 60 km à l'est de Wuxi, dans la province du Hubei. C'est dans ces montagnes escarpées, entaillées par des gorges vertigineuses, que vivrait "l'Homme Sauvage", légende parallèle à celle du Yéti en Himalaya, et qui a fait l'objet de plusieurs expéditions. C'est un des rares endroits du pays où subsiste une forêt quasi originelle surnommée la "maison du trésor vert".
La profondeur remarquable des vallées (Wuxi n'est qu'à 210 m d'altitude) vient de l'altitude très basse du niveau de base représenté par le Yangtse (alt. 100 m). Aussi, la rivière Daninghe a-t-elle creusée transversalement à l'axe des plis EW, selon un tracé en baïonnette, un des canyon les plus spectaculaires de Chine avec des parois calcaires hautes  de 1000 m à 1500 m et percées de grands porches à différents niveaux (descente effectuée en barque à moteur entre Wuxi et Wushan).
 En six jours de reconnaissance, à l'aide de plusieurs équipes et deux véhicules, il a été possible de reconnaître différentes zones situées dans un rayon de 50 km autour de Wuxi : les synclinaux à l'E et à l'W, la vallée de la Daninghe et les murailles W du haut synclinal perché du Daguan Shan (2615 m). (photo 14).

PRÉSENTATION PHYSIQUE

* Géologie : Les roches carbonatées sont représentées par les puissantes formations du Permien (250-500 m) et du Trias (Trias inférieur = 220-550 m et Trias moyen = 700-1000 m) qui recouvrent en discordance les schistes verts et rouges du Silurien (fig. 43). Le Trias supérieur (700 m) est formé par des pélites rouges. Le Jurassique gréseux et à veines de charbon affleure plus au SW en direction de Fengjie. Les plis, tous orientés E-W, sont souvent étroits, parfois écaillés vers le sud (failles inverses) (fig. 44). Plusieurs anticlinaux ont été creusés en combes comme on peut l'observer au N et au NE de Wuxi.
* Hydrogéologie (fig. 45) : Cette structure caractéristique détermine des zones karstiques et hydrogéologiques bien individualisées orientées E-W. Quand les rivières recoupent les structures - cas des cluses de la Daninghe en amont et en aval de Wuxi - on observe de multiples émergences situées à différents niveaux, entre 0 et  + 200 m environ. Au S de Wuxi, on note plusieurs sources perchées avec de grandes cascades de tufs calcaires, comme celle du Cheval Blanc qui mesure plus de 100 m de haut. (photos 15 a et 15 b).
Les crues  d'été font monter la rivière de 10 à 30 m, ce qui suggère des débits supérieurs à 1000 m3/s alors que le débit d'étiage est de 20 à 30 m3/s. L'une des sources les plus importantes est celle qui draine le synclinal oriental de Wuxi (alt. 195 m, juste à l'E de Wuxi). Le débit de novembre est estimé à 1 ou 2 m3/s (étiage relatif). Compte tenu de l'amplitude des précipitations, le débit moyen de crue en juin doit atteindre 8 à 12 m3/s.
 Du point de vue de l'hydrochimisme des eaux souterraines, on dispose seulement de quelques mesures effectuées dans la grotte de Longwangdong (calcaires du Trias inférieur). Le faciès des eaux est typiquement karstique avec peu de sulfate, de chlorure et de magnésium. La rivière qui coule dans la vallée et la grosse source située plus en amont contiennent par contre beaucoup plus de sulfate et de magnésium.
* Climat : La station météo de Wuxi (alt. 210 m) donne une bonne idée du régime climatique général (fig. 41). Il s'agit d'un climat subtropical de montagne placé sous le contrôle des vents de mousson.
La température moyenne annuelle est de 16,4°C avec un minimum en janvier (5,7°C) et un maximum en août (27,6°C). L'importance de cette amplitude thermique, de 21,9°C, souligne l'effet de la continentalité. Les hivers sont froids et secs (décembre à février), les précipitations tombant sous forme de neige sur les sommets. Les étés sont très chauds et humides (juin à septembre).
Les précipitations moyennes sont de 1255 mm/an pour une variabilité interannuelle  de 1 à 2 (minimum = 811 mm/an, maximum = 1628 mm/an). Le minimum se produit en janvier (15,6 mm) et le maximum en juin (229,9 mm), soit une amplitude de 1 à 15.
* Paysages karstiques : la morphologie karstique est différente de celle des plateaux du Guizhou où dominent les vastes étendues de cônes et de pitons. Ici la structure plissée très marquée s'impose dans le paysage. Sur les anticlinaux étroits au N de Wuxi, la forme en chevron domine et atteint rarement la morphologie conique (morphologie en "fer à repasser"). Les fonds de synclinaux sont remblayés et occupés par des poljés dont les pertes de bordure traversent parfois les anticlinaux. Sur les plis les plus amples, notamment à l'W de Wuxi (route Fengjie-Wuxi), de beaux karsts coniques étagés et à ouvalas se sont développés entre 500 et 1500 m d'altitude.
Un karst à buttes et ouvalas (qiufeng-ouvala) semble exister sur le haut synclinal perché du Daguan Shan (2500 m) ; nous y avons repéré des pertes situées à 1600 m d'altitude ainsi que de nombreuses dépressions (d'après image satellite et carte topographique au 1/50 000).
La présence d'altérites épaisses recouvrant partiellement les lapiés de même que les abondants remplissages souterrains attestent l'existence d'une ancienne couverture non calcaire - les marnes rouges du Trias supérieur - qui a été détruite et altérée. Des affleurements résiduels de Trias supérieur subsistent dans quelques synclinaux, en particulier à l'W de Wuxi près de Shanghuang. De plus, le sommet de la série calcaire du Trias moyen montre de nombreux bancs schisto-argileux dont l'altération libère un abondant matériel argileux qui colmate dépressions et lapiés : ce phénomène est visible à l'extrémité NE du synclinal oriental de Wuxi, au-dessus du village de Tongchengba. (RM et ZD)
* Les cavités : Treize cavités principales ont été explorées dont douze topographiées. Par manque de temps, plusieurs n'ont pas été terminées. De nombreux secteurs n'ont pas été visités à cause aussi de l'accès difficile. L'aspect "alpin" de cette région, symbolisé par une structure plissée remarquable, des canyons profonds et une série calcaire de plus de 1500 m, se traduit par un potentiel hydrokarstique qui dépasse par exemple 1600 m dans le synclinal E de Wuxi (un regard sur le réseau a été découvert à - 150 m près du village de Tongchengba) et probablement plus de 2000 m à l'E du Daguan Shan. Ce sont les plus forts potentiels karstiques connus de Chine centrale et méridionale.

DESCRIPTION DES CAVITÉS

I.  LES CAVITES DE LA ZONE DE TONGCHENGBA

Cette zone fait partie du bassin synclinal situé immédiatement à l'E de Wuxi.
Toutes les cavités décrites se situent autour du village de Tongchengba ; elles se développent dans les calcaires de la base du Trias inférieur (étage Jialingjiang T1j). Il s'agit de calcaires micritiques gris et noirs en bancs fins à moyens. Le pendage est à cet endroit de 7 à 11°, de  direction N248° à N290°.
Trois des cavités que nous avons explorées forment un intéressant début de réseau. Tongchengba-Xiaoshuidong se situe à l'amont et forme la perte principale de la zone ; la perte du Nanmu se situe en aval et draine une autre partie de la montagne. Quant à SifangdongheTiankeng, c'est le maillon le plus en aval ; il s'agit d'un superbe gouffre, profond de 158 m, qui permet d'accéder au réseau. (JPB.).

A. SIFANGDONGHETIANKENG

Gouffre de la rivière Sifangdong (fig. 46)
Wuxi n° 89/6
Z = 860 m  Dév. = 342 m  Dén. = - 158 m
Situation : Il se situe à 11 km à l'est de Wuxi tout près du village de Tongchengba.
Description : L'entonnoir d'entrée, de 20 m x 30 m, est encombré de végétation  qu'il faut couper à la machette pour atteindre la lèvre d'un puits impressionnant d'où remonte le bruit lointain d'une rivière.
  Profond de 97 m, ce puits mesure 4 m x 6 m de large sur les 50 premiers mètres. Vers la cote - 60 m, il débouche au plafond d'une salle. Le P97 est suivi immédiatement par un puits de 13 m. La paroi gauche, en descendant, est formée d'une puissante coulée stalagmitique en partie érodée. Derrière, on voit encore la lumière blafarde du puits d'entrée tandis que s'amplifie le grondement de l'eau : une ambiance quasi alpine ! Une vire argileuse longue de 20 m conduit à un ressaut de 6 m. A - 123 m, on prend pied sur le sommet de l'éboulis glaiseux de la salle : celui-ci descend à 45° jusqu'à un ressaut de 5 m où se jette la rivière souterraine (premier siphon à - 154 m) : nous sommes dans le collecteur du système de Tongchengba qui draine l'angle NE du synclinal oriental de Wuxi.  L'actif provient de l'angle SE de la salle par une cascade qui n'a pas été remontée mais  une jonction avec Nanmu Tiankeng (cf. infra) est très probable.
La suite se situe au-dessus du ressaut de 5 m (angle NE) par une conduite forcée de 2 m x 2 m  dans laquelle l'air est aspiré fortement. Après une progression facile de 30 m, on débouche sur un puits de 11 m. Au fond, une galerie argileuse se dirige vers le NW et se termine au bout d'une trentaine de mètres sur un siphon boueux à la cote - 158 m. Le courant d'air s'échappe par un puits ascendant localisé 15 m avant le siphon. L'amont de la galerie se termine également sur un siphon. La rivière n'est pas retrouvée. Durant la mousson d'été, les pluies torrentielles provoquent des crues souterraines impressionnantes. L'onde de crue, en pénétrant violemment dans la salle, s'entend de l'extérieur comme un coup de canon tandis que s'échappe un panache de vapeur (témoignage des habitants du village).Les limons recouvrent les parois de la salle jusqu'à la base du puits de 13 m, indiquant une mise en charge de 50 m. (RM)

B. TONGCHENGBA XIAOSHUIDONG

Perte de Tongchengba (fig. 47)
Wuxi 89/7
Z = 930 m  Dév. = 84 m  Dén. = 41 m
Situation : Elle se situe à 11 km à l'est de Wuxi tout près du village de Tongchengba.
Description : C'est avec beaucoup d'espoir que nous descendons le premier puits de cette perte temporaire. 35 m de descente dans une roche saine, et nous prenons pied dans une galerie rapidement coupée par un second puits de 7 m ; malheureusement 30 m plus loin la progression est stoppée par un siphon, bel objectif pour des plongeurs. Tout comme la grotte de Nanmutiankeng, cette cavité se développe vers l'ouest. (JLM)

C. NANMUTIANKENG

Gouffre du Nanmu (fig. 48)
Wuxi N° 89/8
Z = 920 m  Dév. = 96 m  Dén. = - 47 m
Situation : Il se situe à 11 km à l'est de Wuxi tout près du village de Tongchengba.
Description : Cette perte à sec lors des explorations se développe sur une fracture E-W. Un ressaut de 3 m suivi d'un puits de 23 m nous amène à un palier dominant un dernier puits de 17 m. Une vasque d'eau profonde sera notre terminus car nous ne pourrons franchir la voûte mouillante qui fait suite. Le violent courant d'air aspirant s'engouffrant dans la voûte mouillante nous laisse espérer une jonction probable avec le réseau amont du grand puits de SifangdongheTiankeng (supra). A l'amont,  une traversée au-dessus du P17 et une escalade nous permettent de descendre un  puits parallèle se terminant sur un siphon. (JPB)

D. SHUJING 1

Puits 1 (fig. 49)
Wuxi n° 89/9
Z = 910 m  Dév. = 62 m  Dén. = - 56 m
Situation : Il se situe à 11 km à l'est de Wuxi tout près du village de Tongchengba.
Description : La légende dit que des soldats auraient jeté des villageois dans ce gouffre, mais nous n'avons trouvé aucun ossement. Ce puits de 56 m que nous ont indiqué les paysans fait partie des très nombreux gouffres qui trouent le plateau ; en une demi-journée nous avons pu en repérer une vingtaine. Après une descente de 50 m, nous prenons pied sur un éboulis ; aucune suite n'est possible sauf peut-être une cheminée hypothétique. Un petit puits parallèle n'a pas été exploré. (JLM)

E. SHUJING 2

Puits  2  (fig. 49)
Wuxi n° 89/10
Z = 950 m  Dév. = 57 m  Dén. = - 54 m
Situation : Il se situe à 11 km à l'est de Wuxi tout près du village de Tongchengba.
Description : Ce puits qui  présente une morphologie similaire au puits 1, s'ouvre aussi sur une fracure N-S. Une première descente de 43 m, fractionnée trois fois, mène à un cône d'éboulis fort pentu suivi d'un ressaut de 4 m qui marque la fin de la cavité à la cote - 54 m. Seule une petite lucarne n'a pas été explorée. (JLM)

II. LES CAVITÉS AU NORD DE WUXI

Plusieurs cavités moyennes ont été explorées au nord de Wuxi, vers 300 m d'altitude, à partir de la vallée de la Daninghe et de ses affluents. En altitude, une reconnaissance a permis de visiter la paroi W du synclinal perché du Daguan Shan entre 1200 et 1600 m d'altitude.

A. FENGDONG

Grotte du vent  (fig. 50)
Wuxi n° 89/4
Z = 290 m  Dév. = 303 m  Dén. = - 13 m, + 34 m
Situation : Fengdong  se situe dans le village de Shuangxi en rive droite de la rivière Daninghe. Au village prendre la passerelle branlante qui traverse la rivière et emprunter vers l'aval l'ancienne voie principale creusée à flanc de falaise.
Contexte géologique : La cavité s'ouvre dans les strates verticales du flanc nord d'un anticlinal pincé de direction E-W. Elle se développe dans des calcaires à cherts du Permien supérieur, et dans les calcaires à bancs fins du Trias inférieur (T1dy).
Description : L'entrée de la grotte, défendue par une porte, sert d'entrepôt de dynamite ; il nous est donc interdit d'utiliser nos lampes à acétylène dans la zone d'entrée, mais cela n'empêche pas le maître des lieux d'utiliser un braséro. Derrière, la suite mal murée est une petite galerie (largeur 3 m, hauteur 2 m)  menant à une salle inclinée avec à sa base un lac de même altitude que la rivière Daninghe. Ensuite,  la galerie principale mène soit à un ressaut de 15 m sans suite, soit à un puits qui redescend sur la salle. Une autre galerie descendante,  de plus en plus étroite, se termine sur un siphon. Le courant d'air légèrement aspirant semble être dû à la simple différence de température (environ 10°C) avec l'extérieur. Cette grotte présente un ensemble de très belles conduites forcées qui se développe dans les strates verticales dominant la rivière Daninghe. (JB et JPB)

B. FENGDONGZI

Grotte du vent (fig. 51)
Wuxi n° 89/5
Z = 360 m  Dév. = 176 m  Dén. = - 9 m
Situation : Cette grotte s'ouvre en rive gauche de la rivière Daninghe à 2 km au nord du village de Tanmuping.
Contexte géologique : Cette résurgence est située sur l'axe d'un synclinal pincé orienté E-W. Elle se développe dans les bancs massifs de calcaire à cherts du Permien inférieur.
Description : L'entrée est située 30 m au-dessus de la rivière ; il s'agit d'une petite galerie concrétionnée horizontale d'environ 4 m de haut par 5 m de large qui se poursuit sur 160 m. Là, un passage étroit derrière une laisse d'eau permet de descendre au siphon terminal. Il est probable qu'il ne s'agisse que d'un siphon temporaire dont l'assèchement expliquerait les dires des gens de Tanmuping quant aux prolongements de la grotte jusqu'à une rivière souterraine. (JB)

C. LONGDONG

Grotte du Dragon (fig. 52)
Wuxi n° 89/3
Z = 320 m  Dév. = 134 m  Dén. = + 69 m
Situation : Longdong se trouve 100 m à l'est du village de Xiningqiao, en rive gauche de la rivière Xixihe, juste au bord de la route.
Géologie : Cette cavité très simple se développe dans le pendage des couches calcaires du Trias inférieur (T1 dy).
Description : Une escalade de 8 m permet d'accéder à l'entrée de la cavité (2 m x 2 m). Une petite salle (3 m x 3 m) concrétionnée et une  escalade de 3 m nous amènent à un passage étroit (0,5 m x 0,5 m). A partir de cet endroit, la cavité se développe simplement en remontant dans le pendage (40°). Dans la partie terminale, le toboggan prend de belles dimensions, 5 m de large sur 3 m de haut ; hélas celui-ci se termine sur une obstruction de concrétions à la cote + 69 m. (BC et JPB)

III. LES CAVITÉS DE LA PAROI OUEST DU DAGUAN SHAN

Le karst d'altitude du Daguan Shan, situé à 13 km au nord de Wuxi, est formé par un haut plateau de 80 km2 localisé entre 1700 et 2500 m d'altitude. Des pertes, repérées sur les cartes, se situent au fond de larges dépressions. Le drainage karstique s'effectue de deux côtés : à l'E et à l'W (fig. 45). Cette région austère et reculée, au climat rude, est cependant habitée.
Situation : A partir du village de Shuangxi situé au fond de la vallée de la Daninghe (alt. 240 m), on remonte à l'E  sur 5 km la vallée se dirigeant au pied des hautes murailles du Xiaoguan Shan (1800 - 2000 m), constituant la partie occidentale du Daguan Shan (2556 m) proprement dit.
Géologie : Le Daguan Shan est formé par l'épaisse série des calcaires permo-triasiques qui repose en discordance sur les schistes verts du Silurien (1100-1200 m d'altitude). Les cavités étagées dans la paroi suggèrent des stades d'évolution du système karstique.
Description : Une série de cavités étagées apparaît dans la paroi. A sa base, une émergence sort au contact des calcaires du Permien inférieur et des schistes siluriens imperméables par plusieurs griffons. Une grotte s'ouvre quelques mètres au-dessus et bute au bout de 15 m sur un miroir de faille encombré de blocs. Un sentier aérien permet de grimper dans la paroi et d'atteindre un grand porche dédoublé situé 150 m plus haut. Celui-ci mesure au total plusieurs dizaines de mètres de haut. Le tunnel inférieur est éventré sur le côté sud ; il se poursuit dans la montagne, mais l'entrée est défendue par de hauts murs (corde nécessaire pour rejoindre la cavité à partir du sentier). Cette grotte a servi de temple au cours des siècles derniers. Une autre cavité localisée en pleine falaise (porche rectangulaire de 60 m de haut), plus au sud, n'a pu être atteinte faute de temps et de matériel. Des passerelles sommaires, apparemment abandonnées, traversent des abîmes vertigineux pour conduire probablement à la grotte. (RM)

IV. LES CAVITÉS A L'OUEST DE WUXI

Plusieurs cavités actives et sèches ont été explorées à l'W et au SW de Wuxi entre 700 et 1000 m d'altitude. Le drainage souterrain s'effectue dans l'axe des plis : soit vers l'E pour émerger notamment dans le canyon de la Daninghe (ex : cascade du Cheval Blanc) (photos 15 a et 15 b) à partir du poljé de Shanghuang (ponors) ; soit vers l'W en direction de la rivière Fenshui (cas de Xinlongdong, - 167 m). (fig. 45).

A. CHUNSHUPINGTIANKENG

Gouffre de Chunshuping (fig. 53)
Wuxi n° 89/1
Z = 1080 m  Dév. = 75 m  Dén . = - 65 m
Situation : Il se situe à 12 km au SW de Wuxi tout près du village de Chunshuwan.
Contexte géologique : Ce puits s'ouvre à flanc de montagne et se développe dans les dolomies argileuses et les marnes du Trias inférieur (étage Jialingjiang). Le pendage est de 19° et de direction N274°.
Description : Cette cavité s'ouvre par un minuscule orifice se situant sur une pente herbeuse exposée au SE. Le courant d'air chaud qui en sort nous invite à l'exploration. Une étroiture sévère nous mène au sommet d'un puits de 10 m développé au profit d'une fracture SE-NW. A sa base, un joli trou rond de 1 m de diamètre perce le plancher et donne accès à deux verticales de 15 m chacune. Ces deux puits, de style "alpin", ne présentent aucun concrétionnement. Au fond, un solide pont rocheux barre la suite ; une énergique désobstruction d'une heure en vient à bout et permet de descendre un puits de 25 m. En bas, nous prenons pied sur un tas de graviers lavés par les eaux qui marque la fin de la cavité à la cote - 65 m. Seul un filet d'eau poursuit son chemin dans une fissure SE. (HDG)

B. XIAOSHUIDONG

Grotte de la perte (fig. 54)
Wuxi n° 89/2
Z = 709 m   Dév. = 74 m  Dén. = - 26 m
Situation : Elle est située à 24 km au SW de Wuxi, près du village de Longwangmiao.
Contexte géologique : Sise sur le bord nord du poljé de Shanghuang, cette perte se développe dans les bancs épais de calcaires et de brèches du sommet du Trias inférieur (étage Jialingjiang). Le pendage est de 54° et de direction N170° .
Description : Cette perte s'ouvre par une petite entrée aménagée en gradin. Après deux puits (P5, P6) et une courte galerie déclive, le ruisseau, d'un débit de 20 l/s lors de l'exploration, s'engouffre dans un siphon sombre et boueux. Un passage dangereux dans une trémie de galets en entonnoir nous permet de continuer un peu l'exploration dans une galerie remontante. Malgré un courant d'air aspirant important, nous arrêtons l'exploration très préoccupés par notre retour et le passage de la trémie. Des branches coincées au sommet des puits témoignent d'une mise en charge totale de cette perte et rendent l'endroit peu sympathique. (JPB)

C. LA GROTTE DU TUNNEL

(fig. 55)
Wuxi n° 89/13
Z = 700 m   Dév. = 200 m  Dén. = + 10 m
Situation : Cette cavité sans orifice naturel connu s'ouvre à la faveur d'un tunnel artificiel de drainage qui relie le poljé synclinal de Shanghuang à une vallée située 2 km au N.
Contexte géologique : La grotte se développe dans les calcaires du Trias au sein d'un anticlinal d'axe E-W.
Description : La cavité s'ouvre à 250 m environ de l'entrée du tunnel. Un escalier conduit à une trémie de blocs d'où provient un petit écoulement. Après quelques passages étroits et oppositions, on pénètre dans une salle d'effondrement large de 20 m. En amont, on observe un ancien canal artificiel d'où provient un ruisselet (siphon) ; à l'aval, le mur s'est effondré à la hauteur de la trémie. Le réseau se poursuit au nord par une galerie subhorizontale de 5 à 8 m de large agrémentée de banquettes limoneuses, de laisses d'eau et de quelques concrétionnements. Au bout d'une centaine de mètres, le conduit se jette dans un puits estimé à 8 m qui n'a pas été descendu faute de matériel et de temps. Le fond est occupé par un lac tandis que la galerie paraît continuer en face. (RM)

D. LONGWANGDONG

Grotte du Roi des Dragons  (fig. 56)
Wuxi n° 89/11
Z = 730 m  Dév. = 525 m  Dén. = + 17 m
Situation : Elle est située à 17 km au SW de Wuxi, à proximité du village  de Shanghuang.
Contexte géologique : Cette résurgence se développe dans les calcaires en bancs épais du Trias inférieur (T1 j). Le pendage est à cet endroit de 19° et de direction N024°.
Hydrologie :  Le débit moyen de cette résurgence, 48 l/s, n'était que de 5 l/s lors de l'exploration  en  ce début d'étiage d'hiver (11/89). L'eau apparaît à l'extrémité de la cavité qu'elle traverse entièrement, avant de rejoindre une rivière superficielle beaucoup plus importante. Le faciès chimique des eaux est typiquement karstique, avec peu de sulfate, de chlorure et de sodium et beaucoup plus de calcium que de magnésium. La rivière coulant dans la vallée et la grosse source située plus en amont contiennent par contre beaucoup plus de sulfate et de magnésium.
Description : Toute la cavité est si parfaitement alignée sur une grosse fracture que l'on voit le jour à plus de 100 m de l'entrée, alors que la galerie ne fait que 5 m de large. Celle-ci est doublée sur une partie de sa longueur par un conduit secondaire rigoureusement parallèle. La morphologie d'ensemble et les microformes de corrosion omniprésentes (coupoles) indiquent que le creusement s'est fait essentiellement en phase noyée, alors que le niveau du fond de la vallée était situé plus haut. Par la suite, le niveau hydrologique de base s'est enfoncé, et l'érosion a commencé à inciser le plancher du conduit. Cette érosion s'est faite de manière régressive (de l'aval vers l'amont) et n'a pas encore beaucoup progressé (200 m environ).
L'amont du réseau est donc presque horizontal, avec de petits barrages de calcite régulant le niveau de l'eau. Après 400 m et un joli passage en opposition, on bute sur un dernier lac et le conduit devient siphonnant. La suite appartient aux plongeurs. Quelques suintements coulent du plafond, en suivant de petites stalactites ou jaillissant directement de fissures. Ces eaux sont (en saison sèche) beaucoup moins minéralisées que celles de la rivière principale captée 200 m à l'intérieur de la grotte. Ensuite, un magnifique canal, mi-maçonné et mi-creusé dans la roche, conduit l'eau jusqu'au jour. Cela permet de faire sortir de l'eau une vingtaine de mètres au-dessus de la résurgence naturelle, ce qui est suffisant pour  irriguer quelques hectares de rizières situés sur un coteau voisin. (BCo. et JB)

E. XINLONGDONG

Grotte du Nouveau Dragon (fig. 57)
Wuxi n° 89/12
Z = 970 m  Dév. = 1585 m  Dén. = + 7 m, - 167 m
Situation : Elle est située à 40 km à l'ouest de Wuxi et à 4 km du village de Xindianzi.
Contexte géologique : Cette grotte se développe dans les calcaires et les dolomies du Trias inférieur (étage Jialingjiang). Le pendage est à cet endroit de 8° et de direction N220°.
Description : Cette cavité assez complexe comporte diverses parties apparemment indépendantes les unes des autres, raccordées entre elles à la faveur de quelques éboulements. Elle peut être divisée en cinq parties principales :
1) Etage supérieur "fossile" :
C'est par là que l'on pénètre dans le réseau. Il s'agit d'un large réseau subhorizontal, bien concrétionné et creusé en régime noyé par un écoulement assez lent comme en témoignent les nombreuses coupoles. Il est à moitié colmaté par l'argile et n'est plus parcouru que par quelques suintements. C'est une grotte assez belle qui pourrait être aménagée pour le tourisme ; actuellement, elle est surtout pillée par les collectionneurs de concrétions.
2) L'aven et la grande salle :
Il s'agit d'un magnifique aven, avec des cannelures, qui aboutit au plafond d'une grande salle d'effondrement encombrée d'éboulis. La genèse de l'aven et celle de la salle pourraient être  indépendantes.
3) Zone labyrinthique intermédiaire :
C'est un entrelac de galeries sèches, encombrées de sables et limons et de blocs, mais pauvres en concrétions. Ce réseau tridimensionnel à coupoles omniprésentes, correspond à une genèse en régime noyé profond, à courant lent. Cette partie semble totalement indépendante de l'étage supérieur, morphologiquement très différent, avec lequel elle ne communique qu'à la faveur de la grande salle d'effondrement.
4) Le réseau actif :
Cette petite rivière pérenne (aux mises en charge importantes) surcreuse son lit dans une galerie grossièrement cylindrique. Ses eaux sont agressives et transportent des débris ligneux.
5) La grande diaclase :
La rivière recoupe une belle diaclase que l'on peut suivre sur une grande longueur et quelques mètres de haut. Cette diaclase communique avec quelques petites galeries sèches dont les parois sont noires. Nous n'avons pas terminé l'exploration faute de temps. (BCo.)

CONCLUSION

La région de Wuxi présente un potentiel important en grottes et en gouffres profonds. Le cas du synclinal oriental de Wuxi, avec un potentiel de plus de 1600 m, est caractéristique : un premier maillon du système karstique a été découvert près du village de Tongchengba. Le karst d'altitude des synclinaux perchés reste encore une inconnue. Tout reste à faire également dans le canyon de la Daninghe en aval de Wuxi où de multiples entrées de cavités ont été observées dans les immenses parois.
L'évolution du relief et des réseaux est en étroite relation avec l'orogenèse néogène (tectonique himalayenne) d'où la vigueur du relief et le contrôle tyrannique de la structure sur le modelé. L'instabilité de certains versants est caractéristique dans le Trias inférieur dolomitique de Wuxi (ex : écroulement du 1/9/87 au sud de la ville faisant 100 victimes). Les glissements sont abondants dans le Jurassique gréseux au nord de Fengjie. Les veines de charbon du Jurassique sont encore exploitées à flanc de falaise dans des conditions très difficiles (route Fengjie-Wuxi). Les rivières descendant des Daba Shan, aux crues d'été violentes, ont subi des aménagements pour augmenter les terres cultivables des basses terrasses. Ces tentatives ont parfois abouti à des échecs cuisants comme au nord de Fengjie, les digues et les berges ayant été emportées sur la rive concave tandis que des accumulations de galets ont stérilisé l'autre rive. (RM)

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