dong Hongzhaozidong - 红罩子洞

1. Hongzaozidong - Grotte du Brouillard Pourpre
Code : Sui011 - Village : Wenquan
Lat. : 28°13’29,7” - Long. : 107°16’15,8” - Alt : 840 m
Depuis le village de Guihua, il faut se diriger au sud et rejoindre la vallée aveugle de Xiadong dont le cours est à sec durant l’hiver. On la remonte sur près de 2 km, puis on monte sur la gauche jusqu’à un petit col donnant accès à une doline-perte profonde de 75 m et recouverte d’une jungle touffue. Cette dépression située à la confluence de deux vallées a capturé les écoulements.

"BOTTAZZI, Jean; CLÉMENT, Nicolas; FAURE, Nicolas; MAIRE, Richard; MANGEL, Laurent; LI, Po; POUILLY, Marc"
Karstologia Mémoires, n° 9 : Voyages en terre chinoise : Chapitre 4
Analyse :
Le district de Suiyang est au nord du Guizhou (Chine). Il recelle la plus longue grotte de Chine, creusée dans les calcaires et dolomies de l'ordovicien et du cambrien. Ce chapitre décrit l'état des explorations à l'issue des expéditions de 2001 et 2003 qui sont venues poursuivre les explorations débutées en 1988 par une équipe sino-niponne. La topographie de ce réseau géant (54,3 km en incluant les découvertes de l'année 2003) est donnée dans un additif en fin d'ouvrage. Ce chapitre contient également l'étude d'un têtard oreolalax observé sous terre. (BJ).

553 caractères - Lu 115 Fois


Hongzhaozidong (29)
Hongzhaozidong a beau être l’une des premières entrées explorées du réseau, il est actuellement toujours payant d’en fouiller les recoins. Les nouvelles découvertes décrites ci-dessous sont d’un accès relativement aisé si l’on ne se formalise pas trop pour la marche d’approche, car il faut parcourir toute la gorge de Muzhutanggou et la descente dans la doline d’entrée.
Le puits de la dormeuse
Ce P46 est situé au bout de la première galerie fossile à gauche dans Hongzhaozidong, en bas du tiankeng d’entrée. La galerie est barrée par le puits, mais par une vire à gauche prolongée d’une escalade artificielle, on a pu le traverser. Contrairement à la galerie précédant le puits, les concrétions de gypse n’ont pas été récoltées comme c’est le cas dans toutes les galeries accessibles du réseau. Mais trop rapidement, il ne reste pour prolongement qu’un puits de 20m avec une petite salle terminale à sa base. Les diverticules de la galerie précédant le puits de la dormeuse ont été fouillés. Ils présentent également de nombreuses crosses de gypse. Les joints ont été rongés par la dissolution, donnant de nombreuses petites branches fossiles.
Le puits de la dormeuse semble avoir été creusé par un écoulement remontant. En effet, dans les petites galeries explorées à sa base, une coupe naturelle dans les varves sableuses montre un remplissage de plusieurs mètres qui aurait entièrement été englouti par le boyau sous-jacent s’il s’était agi d’une perte.
La rivière endormie
La rivière endormie est le prolongement du méandre découvert en 2001 en bas du puits de la dormeuse. À la base du puits, nous sommes descendus dans le méandre pour passer par le P6. Les passages supérieurs, en dehors d’une possible lucarne dans le puits, ont été tous explorés. L’un d’eux permet d’éviter les difficultés de l’itinéraire initial.
Après le P6, le méandre se dédouble et se regroupe à deux reprises. Plus loin, le fond est rempli d’eau. Alors que la profondeur des gouilles augmente, le plafond se rabaisse et les parois se resserrent. Il faut passer deux étroitures pour franchir cette zone désagréable où il faut se mouiller pour franchir une marmite un peu trop large et ramper sur un fin plan- cher de calcite en espérant qu’il ne se rompe pas, ce qui se solderait par un bain intégral. Mais la suite en vaut la peine. Le plafond se relève et le conduit reprend une forme de méandre, haut de 3 à 4 m pour 1 m de largeur.
Sur le côté, dans un coude bien prononcé, on note un méandre affluent accessible en escaladant un premier ressaut de 5 m. On traverse une petite salle avec une arrivée en hauteur, puis on grimpe un second ressaut de 5 m, puis un troisième de 3 m. En haut, le méandre continue. L’aval revient en hauteur dans la petite salle précédemment traversée. L’amont permet de rejoindre la base du P46 par un itinéraire un peu
compliqué dans les passages supérieurs.
Une centaine de mètres après le coude avec le méandre affluent, en bas d’un ressaut, on retrouve une laisse d’eau enchâssée dans la calcite. Un peu avant, en étant attentif, on observe deux squelettes visiblement très vieux dont le premier est un carnassier de la taille d’un chat. Le méandre se poursuit, un dépôt de sédiments remplace le sol calcifié. Après une transition particulièrement horizontale, le méandre reprend de la pente avec quelques ressauts. On est arrêté sur un puits de 25 m. À sa base, juste à côté de la corde, il y a un squelette très ancien d’un félin de grande taille, pour le moment non identifié.
Les parois sont ornées de bouquets d’excentriques. Le méandre en aval du P25 en est abondamment pourvu. On franchit une étroiture, puis on est bloqué par une coulée de calcite. Le passage qui subsiste est gros comme le poing. On entend un peu en arrière ronfler le courant d’air. Il n’y a aucun espoir de franchissement. En haut du P25, il semble possible de grimper plus haut que le plafond du méandre par lequel on arrive et ensuite de traverser le puits. Mais il faut placer une corde d’assurance et ne rien faire tomber, car le fossile situé au-dessous est très fragile.
Le ramping apéritif
En 2013, nous avons établi un bivouac dans une zone large et plate un peu avant le P50 donnant accès à la galerie des regrets et à la galerie des carreaux cassés. Une dizaine de mètres avant ce bivouac, sur la gauche, un laminoir part sur la droite de la galerie. Il développe une centaine de mètres. Son sol est très sec et légèrement sablonneux. Il présente une étroiture dans son premier tiers et s’achève sur un rétrécissement infranchissable.
Le labyrinthe de la bête
Une centaine de mètres avant le ramping apéritif, un autre laminoir, plus large, est facilement repérable. Il donne accès à un labyrinthe de passages plutôt bas même si on n’y rampe qu’exceptionnellement. Il offre 401 m de développement dans un secteur sub-horizontal de 6500 m2. On y dénombre 8 carrefours et deux autres jonctions avec la galerie principale. Le sol est plutôt varié, on trouve des limons légèrement sableux, des cailloux anguleux et une zone d’argile craquelée. Les zones argileuses ont conservé les traces d’une bête pourvue de griffes.
La galerie des crosses
Cette galerie découverte en 2008 par une petite traversée en haut du P50 a un nouvel accès. Dans la galerie d’entrée, il faut continuer à l’aval et repérer une galerie partant en haut d’un mur de remplissage. Des petites marches taillées du temps des exploitations de nitrates facilitent la montée, mais un léger dévers donne quelques sueurs froides. Ce n’est pas réellement un accès plus facile. Au bout de 50m, après une salle formée au recoupement d’une diaclase transversale, on descend par une étroiture. La jonction avec la galerie des crosses est tout de suite derrière. Les laminoirs qui avaient été négligés lors de l’exploration précédente ont été topographiés : ils n’offrent pas de continuation.
Dans la galerie d’entrée
Un peu avant la première perte dans la galerie d’entrée de Hongzhaozidong, les petits laminoirs en paroi de droite ont été explorés. Le premier en partant du fond est le plus large. Il est vite rejoint par le deuxième. Il faut ramper pour continuer. On se relève dans une galerie qui ne reste pas haute longtemps, que l’on aille à droite, où on finit par ressortir dans la galerie principale, ou à gauche où la calcite forme un étroit laminoir de choux-fleurs parcouru par un léger courant d’air.
Le siphon éloquent
Dans la galerie d’entrée de Hongzhaozidong, on suit une rivière jusqu’à une petite perte avec un puits qui descend au collecteur. La galerie continue et permet de trouver une perte de trop plein avec un puits de 50 m qui descend parallèlement. En haut de ce puits, une petite galerie de 300 m a été explorée en 2018.
Ce petit bout de réseau apporte des informations inédites sur la formation de la cavité. Cette galerie sur le plan de la grotte évoque une ancienne continuation fossile au-dessus de l’actif. En fait, il n’en est rien, il s’agit d’un ancien affluent arrivant en quelque sorte à contre-courant, puisque la direction des écoulements se fait du sud vers le nord, contrairement à tous les autres écoulements locaux, que ce soit la perte de Hongzhaozidong ou le collecteur sous-jacent. La fréquence de ces écoulements est actuellement rarissime à en croire l’aspect sec et peu dense des sédiments argileux à sa sortie. Mais tous les indices, que ce soit l’entonnoir par lequel on y descend, la disposition du talus de sédiments à la sortie, la forme des suçoirs dans la galerie basse horizontale qui rejoint le sommet du P50, montrent qu’à une certaine époque, l’eau remontait par cette galerie. D’autre part, le P50 était sans doute noyé, sans quoi les sédiments à son approche auraient été emportés. Les remplissages comportent de nombreux micro galets verts typiques des couches ordoviciennes et qui sont aisément transportables par des écoulements de faible vitesse. Mais cette phase d’écoulements doux a été précédée d’une phase d’écoulements très violents, à en croire la disposition d’un gros bloc charrié par une crue.
Malheureusement et malgré le franchissement d’étroitures de plus en plus resserrées, il n’a pas été possible d’atteindre le point bas de ce siphon. L’ambiance de plus en plus humide et l’absence de courant d’air font que la désobstruction nécessaire pour avancer au fond ne sera pas entreprise et le siphon éloquent n’en dira pas plus.
Les hauteurs du collecteur
La galerie amont des carreaux cassés s’achève par des balcons sur un collecteur. Nous en avons fait l’exploration en 2013. En effet, il nous avait semblé apercevoir une galerie de l’autre côté du canyon où circule le torrent.
Traverser directement le canyon à cet endroit est un peu technique. On peut en revanche suivre la vire vers l’aval sur une cinquantaine de mètres et trouver un endroit où un bloc coincé permet de passer sans difficulté sur l’autre rive. Ce pont naturel est le bienvenu, car il y a une galerie juste en face. On arrive tout de suite à une bifurcation. Le passage de droite repart vers l’amont et rejoint le collecteur en balcon par la galerie qui avait motivé notre venue et par une autre, à peine plus loin, qui arrive juste à l’aplomb de l’extrême amont connu de ce tronçon de rivière. Le passage de gauche va à l’aval. Il aboutit sans surprise en balcon au-dessus de la rivière. En suivant la vire, on arrive à la fracture bien nette correspondant à l’arrêt de l’exploration de l’amont de la rivière timide. Nous sommes 20m au-dessus de la rivière, mais nous n’avons pas pu jonctionner physiquement, car il y a un pas trop dangereux pour être tenté sans corde. La topographie confirme le bouclage. Cet ensemble de galeries en trou de serrure, présente des traces d’érosion en régime torrentiel. Leur exploration précise le parcours de la rivière timide. Son amont reste à explorer.
La perte boueuse
L’aval des carreaux cassés, juste après une magnifique zone de décantation au sol d’argile craquelée, présente une perte boueuse sur la gauche. Il s’agit d’un conduit méandriforme n’excédant pas 2m de large et 2 m de haut. Sa visite n’est pas des plus agréable. Les pas s’enfoncent souvent dans la boue et il n’y a rien de propre pour prendre appui sur les mains. Dès le début, un départ sur la droite a été négligé. Une centaine de mètres plus loin un petit affluent impénétrable arrive par la gauche. Une vingtaine de mètres plus loin, à droite, un méandre remontant a été suivi sur une courte distance. Les escalades et oppositions dans la boue y rendent la progression malcommode au possible. Encore plus loin, c’est une bifurcation. Le méandre de gauche a été suivi sur 60m, puis il faudrait se vautrer dans la boue pour avancer, ce que nous avons renoncé à faire. Le méandre de droite a été suivi sur 60 m également et présente l’avantage de devenir impénétrable, mais l’inconvénient d’être légèrement ventilé. Ce système de pertes développe en tout 322 m et ne présente pas grand intérêt. Son extrémité aval est tout proche d’une zone siphonnante de la rivière timide et à peu près au même niveau. La présence de courant d’air, même faible, a de quoi surprendre.
La galerie des cristaux
Il s’agit d’un ensemble de petites galeries, 2 m de diamètre en moyenne, débutant au bout du réseau du brouillard, là où un P25 permet de descendre dans le goulet de la mort qui tue. Un peu avant, il faut monter en sommet de méandre et retrouver un R2 en haut d’une coulée stalagmitique, sur la gauche, dans la galerie nez en l’air retournant vers la galerie des regrets. En bas du R2, on progresse dans un gour fossile somptueusement cristallisé. Plus loin, les excentriques foisonnent sur les parois. L’ensemble développe peu et arrive en plusieurs endroits au-dessus du P25, au sommet du goulet de la mort qui tue.
Affluent des mega-talus d’argiles
Le collecteur des mega-talus d’argiles a été découvert en 2005. Ce n’est qu’en 2016 que nous sommes retournés à ce terminus majeur. En effet, la rivière, la plus puissante du réseau de Shuanghedong, provenant d’un siphon, n’avait pas été explorée jusqu’à son ultime aval.
Les explorateurs de l’époque supputaient un siphon aval très proche et ils avaient raison puisque
l’on peut en tout et pour tout suivre la rivière souterraine sur un peu moins de 300 m seulement. Cette distance se parcourt à flanc de talus d’argile en taillant des marches dans la boue durcie, le courant étant bien trop fort pour envisager de passer dans l’eau. À mi-distance d’un siphon à l’autre, en rive gauche, une grande galerie était restée inexplorée. Par chance, on peut sauter d’une berge à l’autre pour l’atteindre. La galerie est large et haute, mais son parcours n’est pas des plus commodes à cause des dépôts d’argile. Au bout de 100 m, on aboutit à une bifurcation.
La branche de gauche est plutôt accueillante à son début, avec une coulée de calcite et un gour d’eau cristalline. Le sol conserve ce caractère calcifié sur toute la longueur de cet affluent, soit 500m. Mais les parois se rétrécissant et présentant sur plus de la moitié du parcours d’omniprésents dépôts boueux. Cette exploration n’a pas été des plus agréables. Au bout de 250m on franchit une escalade de 6m au sommet de laquelle on passe en opposition au-dessus d’un lac long et profond. Plus loin, une petite branche aval qui devient trop étroite présente des marmites et des gros galets. L’amont s’achève par colmatage presque total par la coulée de calcite que l’on suit depuis le début.
La branche de droite est la plus large. Elle rejoint une petite rivière dont l’aval est un boyau étroit. Elle correspond en débit au petit affluent que l’on observe avant le siphon terminal du collecteur des mega-talus d’argile, à un peu plus de 100m de là. Son amont prend une tournure sportive. Les biefs doivent être évités par des escalades et des vires pas toujours très faciles. C’est sur une escalade de 5m que s’établit provisoirement le terminus de cette branche prometteuse baptisée amont plouf, du bruit de la chute dans l’eau après rupture d’une prise. [Jean Bottazzi]

AUT. VAR (2019)
Jean BOTTAZZI, Éric SANSON, Bruno HUGON, Olivier TESTA, Alain MAURICE, Marc GUICHOT, Florence GUILLOT, Cécile PACAUT, Marc FAVERJON, Marc TREMBLAY, Amandine LABORDE, Nicolas FAURE, Emmanuel VITTE, Jessica MORIN-BUOTE, Éric DAVID, Éric LECUYER, Éric MADELAINE, Gilles CONNES.
Topographes
Jean BOTTAZZI, Éric SANSON, Bruno HUGON, Nicolas FAURE, Olivier TESTA, Barnabé FOURGOUS, Pascal ORCHAMPT, Emmanuel VITTE, Éric DAVID, Marc TREMBLAY, Florence GUILLOT, Fabien MULLET, Marc FAVERJON, Charles BUTIN, Cécile PACAUT, Alain MAURICE, Gilles CONNES, Jes- sica MORIN-BUOTE, Michel ISNARD, Jean-Pierre BARBARY, Patrick LETOURNEL, Marc SÉCLIER, Marc GUICHOT, Vivien MOINAT, Éric MADELAINE, Silvia ARRICA, Silvère PASTUREAU, LIZIXIN, Éric LECUYER, Thierry MONGÈS, Amandine LABORDE, Daniel BETZ, Olivier JÄRMANN, Christian DELAIRE.
Coordination, rédaction, synthèse topographique et composition :
Jean BOTTAZZI
Spelunca Mémoires n° 39 (2019)
Voyages en terre chinoise tome 5. Expéditions spéléologiques franco-chinoises 2011-2019 dans les grottes de Suiyang Shuanghedong

Analyse : gkc-JPB

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