dong Donghe - 洞河

A. DONGHE (DONGHE WUFENG)
"La grotte rivière" (Wf92/13)
Dév. 4 828 m   Dén. - 270 m   Alt. 510 m

La résurgence de Donghe jaillit au fond d'une reculée par un porche de 20 m de haut sur 20 m de large qui a été sommairement aménagé par les paysans. Un ancien canal d'irrigation suit la rivière en rive gauche. Il devait permettre d'irriguer quelques rizières situées plus en aval, mais il a été abandonné depuis longtemps, comme certaines terrasses situées au-dessus de la grotte. C'est le seul cas de ce genre que nous ayons vu jusqu'à présent. Selon les explications que nous avons pu avoir, ces aménagements avaient été réalisés sous la houlette d'un cadre politique très motivé, dans la ligne de "Comment Yukong déplaça les montagnes", mais ils ont ensuite été abandonnés par les paysans, car ils étaient vraiment difficiles à exploiter.

- La remontée de la rivière : La salle d'entrée, de 30 m de large sur 30 m de haut, est une cloche d'effondrement. En rive gauche, elle contient quelques anciens fours à nitrates. La galerie s'enfonce petit à petit dans l'obscurité en décrivant des méandres très photogéniques. Le plancher est taraudé de belles marmites ou recouvert de gros blocs roulés. A 200 m de l'entrée, un petit lac nous barre le passage, mais il peut être évité par la droite, en remontant un éboulis qui aboutit à un beau lit sablonneux. Un peu plus loin, un second lac ne peut être évité que par une vire un peu exposée en rive droite : une sangle est installée pour permettre le rétablissement au-dessus de l'eau. Juste après, nous franchissons une série de petites cascades avec de magnifiques formes d'érosion. Encore quelques vires et on bute sur un nouveau lac profond. Le court-circuit existe : c'est une diaclase qui passe en rive gauche et qui est suivie par une vire exposée. Plus loin, la baignade est inévitable. Nous revenons le lendemain avec canot et néoprène pour tenter la jonction avec l'équipe qui passe par l'entrée supérieure. Il y en a pour près d'un km, avec cinq longs lacs, dont le plus long fait 250 m. La progression dans les bassins est facile, simplement entrecoupée de quelques dunes de galets à escalader. La galerie est toujours très large, alignée sur de grosses fractures, dont une faille de direction N35°E que l'on suit rigoureusement pendant 400 m. par endroits, un passage en banquettes en rive NW est possible du côté où plongent les strates, mais il est plus facile de suivre l'eau. (Bernard, et La Rouille)

- L'entrée supérieure : Pendant que la première équipe remonte la rivière par la résurgence, deux équipes passent par l'entrée supérieure, la première pour tenter la jonction, la seconde pour faire la topo de cette partie jusqu'à la rivière. Cette entrée supérieure, sans doute une ancienne perte, se situe à 50 m de la route, près de 2 km à l'ouest de la résurgence. Un sentier a été aménagé par les Chinois pour rejoindre la rivière souterraine et creuser une galerie de dérivation depuis l'intérieur de la grotte afin d'alimenter l'usine hydroélectrique située 200 m plus bas (captage souterrain et conduite forcée extérieure). La galerie qui rejoint la rivière mesure 700 m de long sur 200 m de dénivellation. On progresse dans un conduit qui s'élargit au fur et à mesure, avec d'abondants concrétionnements, pour atteindre une vaste salle de 240 m de long sur 60 m de large et 100 m de haut au moins. En fait, on arrive en balcon plus de 60 m au-dessus de la rivière dont on entend maintenant le grondement. Un sentier a été installé et parfois taillé sur une vire qui contourne la bordure NE de la salle, puis une série d'escaliers et de balustrades permet de rejoindre la galerie active. L'extrémité nord de cette salle n'a pas été visitée : elle semble continuer encore très haut ! (Daniel)
- La jonction avec l'aval : De l'entrée supérieure, on atteint la rivière de Donghe là où elle sort des blocs. Nous attaquons vers l'est, c'est-à-dire vers l'aval afin de rejoindre l'équipe de la résurgence qui, elle, est partie avec le matériel aquatique (néoprène et canots). Nous espérons ne pas rencontrer de difficultés car nous n'avons rien pour franchir des bassins profonds ! Nous avançons gaillardement, le topofil dans la main, dans une galerie large de 30 m et haute de 50 m ou plus, d'abord encombrée par les blocs de la salle supérieure, puis par des amas de galets. La rivière passe en sous écoulement. Nous progressons vite, les visées se suivent sans difficultés dans un conduit mesurant maintenant 20 à 25 m de large sur une hauteur variant entre 10 et 40 m. Au bout de 400 m, nous évitons un amoncellement de blocs géants formant puits par un conduit latéral (bassins). Après, la galerie se poursuit avec les mêmes dimensions, toujours vers l'est, en présentant quelques larges virages. Le topofil fume... et les petites bobines roumaines de 250 m ne font pas long feu ! Au bout de 650 m, un vrai bassin. Heureusement, une escalade en rive droite permet de le passer sans nous tremper, mais c'est pour nous retrouver aussitôt devant un très long bief qui se perd dans les ténèbres. Au moment où nous commençons un pique-nique mérité, des sons confus nous parviennent de l'aval, puis l'on aperçoit un mauvais canot jaune, en partie dégonflé, qui se dirige à pleine vitesse sur nous. Il est occupé par Bernard qui brandit un carnet topo ondulé et gonflé par l'eau. Il est bientôt suivi par un deuxième canot jaune, aussi mauvais que le premier, surmonté par La Rouille, les moustaches au ras de l'eau. Une ambiance de fête : nous venons de réaliser la jonction au bon endroit, pour les uns et pour les autres, dans ce réseau exceptionnel. (Richard et José)
- L'amont de Donghe : Une large galerie sèche, encombrée de blocs géants, remonte vers l'ouest. Au bout de 250 m, on parvient à un carrefour. Au nord, une puissante terrasse de blocs, haute de 15 m, donne dans une galerie large de 20 m qui se termine au bout de 100 m sur une grosse trémie dans laquelle s'enfile le courant d'air. Une escalade un peu délicate est effectuée, mais aucune continuation n'est évidente et nous préférons ne pas nous enfiler entre des blocs en équilibre instable. 50 m avant, un départ existe 12 m au-dessus de la galerie, mais nous n'avons pas le temps de franchir ce surplomb difficile, mais la suite du réseau est peut être là. Revenue à la bifurcation, la galerie principale aboutit rapidement dans une sorte de salle de 150 m x 50 m dont les strates effondrées obstruent complètement l'extrémité ouest. En revenant, une autre galerie se dirige vers le nord : elle est empruntée par le courant d'air. Un puits intermédiaire perce le plancher et mène à un siphon ; un peu au-dessus, nous descendons un puits-faille de 25 m qui donne sur un bassin profond (siphon). En amont, après un pendule, on aboutit dans la rivière qui s'écoule entre des berges de boue avec de nombreux têtards blancs dépigmentés. Hélas, la rivière sort quelques dizaines de mètres plus loin d'un méandre impénétrable et du dessous d'une énorme trémie fortement aspirante, mais dans laquelle nous n'avons pas trouvé la suite. (Jean-Pierre)
- Hydrogéologie : Donghe est creusée dans les bancs de calcaires massifs du Cambrien, au coeur de l'anticlinal de Changleping. Cette rivière souterraine a un débit considérable qui peut atteindre 50 m3/s pendant la mousson d'été. Il atteint 1,1 m3/s en novembre 1992, en pleine saison sèche, et tombe à 0,25 m3/s en fin d'étiage (données fournies par la station hydroélectrique). Le bassin d'alimentation est estimé à une centaine de km2. Les limites sud et nord de l'aquifère correspondent aux limites d'affleurement des calcaires du Cambro-Ordovicien. Les limites orientales et occidentales restent encore mal définies. Il est probable que le poljé de Changleping soit drainé vers cette émergence. Par contre, nous ne savons pas encore si les pertes situées dans la zone de Changbuxi (Dongxitiankeng, Dongwan) sont drainées vers l'est, donc vers Donghe, ou vers l'ouest, c'est-à-dire vers Longdong-Yanzidong. (Bernard) - ^ -

BARBARY, Jean-Pierre; MAIRE, Richard; ZHANG, Shouyue; POMEL, Simon; COLLIGNON, Bernard; GEBAUER, Daniel; BENAVENTES, Jean; BOTTAZZI, Jean; CHEN, Shicai; FULCRAND,Serge; JIN, Yushang; MATRICON, Sylvain; ORSOLA, Jacques; REMY, Cyriaque; QI, Zhonglin; ZHANG, Dachang; SHI, Mengxiong (1995): Les cavités du comté de Wufeng (Hubei, Chine).-
Donghe 92, karsts de Chine Centrale, Karstologia Mémoires n°6, 1995: p.19-40 (17 figures, 1 tableau, 8 photos).
Analyse : BBS
Description et topos de 15 cavités des secteurs de Changleping et Huanglongdong dans le comté de Wufeng dont: Dadong (10922 m, -214/ +100 m); Dongxitiankeng (5807 m, -382 m); Donghe (4828 m, -270 m); Tiankengcao (3748 m, -216/ +10 m); Jiangjundong (2282 m, -83/ +56 m); Huanglongdong (1531 m, -20 m). (FB).

8306 caractères - Lu 76 Fois




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